Du blurring au burn out, il n'y a qu'un pas

Burn out, brown out, bore out, blurring… Autant de syndromes qui émanent ces dernières années de la sphère professionnelle. De quoi parle-t-on, au juste?
par
Pierre
Temps de lecture 4 min.

S'il est à peu près certain que vous ayez déjà entendu parler du burn out, vous ignorez peut-être ce qu'est le blurring. Derrière ces termes très ‘english' se cachent des syndromes aux frontières floues et aux causes multiples.

Pour Dominique Lelubre, conseillère en prévention psychosociale et psychologue spécialisée dans la souffrance au travail, ces quatre qualificatifs n'ont d'ailleurs pas beaucoup de sens dans la mesure où ils recouvrent des notions et symptômes communs. C'est donc plutôt dans les causes que se logent les nuances.

On a beau classer le burn out et autres syndromes apparentés dans la catégorie des affections dites "professionnelles", il est en fait très rare que la charge de travail ou qu'une relation avec un collègue soit seule en cause.

"Dans un burn out, le travailleur est évidemment mis sous pression au travail, mais il manque souvent de ressources privées pour faire face à ce problème", avance Dominique Lelubre. En d'autres termes, on manque d'exutoires -comme la pratique sportive, par exemple- et l'on s'occupe de moins en moins de son plaisir personnel. Rajoutons à cela l'hyperconnectivité et le rythme imposé par la société: tous les ingrédients sont réunis pour que la corde cède.

Bore out, brown out et blurring, quid?

Au contraire du burn out, qui qualifie le travailleur surmené, le terme ‘bore out' est usité pour parler d'un travailleur qui s'ennuie plus que de raison au travail, soit parce que les tâches qu'on lui donne sont répétitives ou vides de sens, soit carrément parce qu'on ne lui donne rien à faire.

Il fait donc du présentéisme et passe sa journée à regarder sa montre. S'ennuyer au travail, ça ressemble à un rêve, non? Bien au contraire… "Les travailleurs qui s'ennuient en ont honte et le cachent à leurs collègues ou à leur famille. Ils se retrouvent seuls avec leur souffrance, ce qui empire les choses", explique Dominique Lelubre.

Le brown out, quant à lui, touche plus les valeurs du travailleur. Il intervient par exemple quand on donne des tâches insensées à quelqu'un qui est bardé de diplômes et qui n'y trouve donc pas son compte.

Enfin, le ‘blurring', lui, est plus récent. Et c'est bien normal puisqu'il est essentiellement la conséquence de l'introduction massive des nouvelles technologies dans nos vies. Avec les smartphones et laptops, facile de céder à la tentation de traiter quelques mails ou de répondre à un appel professionnel quand on arrive chez soi.

"Mais c'est aussi valable en sens inverse", contrecarre Dominique Lelubre. "Au travail, l'employé répond à son banquier, fait ses courses en ligne…" Le blurring, c'est donc la disparition de la frontière psychologique entre travail et vie privée. D'où son nom qui vient du verbe anglais "blur", qui signifie "estomper".

Le burn out infantile, de plus en plus courant

Si les professions à responsabilités sont souvent plus touchées, il n'empêche que les enseignants sont eux aussi très sujets aux syndromes professionnels. En cause: la perte de sens évidente qu'ils rencontrent dans leur métier.

Mais plutôt qu'une catégorie socio-professionnelle, Dominique Lelubre pointe un certain type de personnalité. Pour elle, les personnes perfectionnistes, qui attachent énormément d'importance à leur travail, sont plus particulièrement touchées.

Notons d'ailleurs que le burn out infantile est lui aussi une réalité. Les enfants concernés sont surmenés et mentalement surchargés: en plus de l'école, ils sont inscrits à une série d'activités parascolaires et sont en outre très sollicités par leur tablette ou smartphone.

Le burn out, c'est dans la tête? Pas tout à fait…

Les syndromes professionnels s'accompagnent généralement d'une grande fatigue, d'irritabilité, d'insomnie, ou encore d'hypertension artérielle. Et ce sont précisément ces symptômes qui finissent par convaincre le travailleur d'aller consulter.

Les médecins généralistes sont souvent à l'entame du processus de guérison, en mettant le patient en incapacité de travail. "Le repos est indispensable", insiste Dominique Lelubre. "Mais il n'est pas suffisant. Il faudra passer par une thérapie pluridisciplinaire, qui gère à la fois le psychologique et le corps, puisque ce dernier est très impliqué. Le patient doit se mettre en mouvement, que ce soit via le yoga, la sophrologie, ou la méditation pleine conscience".

Sachez par ailleurs que la loi impose que votre employeur se préoccupe du stress au travail. N'importe quel travailleur peut donc aller trouver le conseiller en prévention psychosociale, qui est obligatoire. Si celui-ci n'existe pas en interne, il y a d'autres services externes de prévention, comme la médecine du travail, qui peut vous aider à diminuer ce stress lié à votre activité professionnelle.

md