L'école comme tremplin d'intégration

Arriver d'un pays en guerre et tenter de poursuivre sa vie, c'est le quotidien de nombre de familles de l'immigration. Pour les enfants, l'important est de retourner rapidement à l'école, chemin d'une intégration sereine. Mais cela s'avère parfois un parcours du combattant.
par
Nicolas
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Quand diverses associations sont venues en 2015 à la rencontre de centaines de Syriens rassemblés au parc de la Rosée à Molenbeek, elles ont constaté le nombre importants d'enfants -plus de 300- qui n'étaient pas scolarisés. Il faut dire qu'il n'est pas simple pour des familles de primo-arrivants de mener de fronts plusieurs démarches (logement, travail, administration, éducation,...) lorsque se dressent de hautes barrières linguistiques, culturelles, mais aussi sociales.

Facilitateurs

Ph. D. R.

Des structures telles qu'Infor-Jeunes Laeken et la Coordination des Écoles ont alors mis sur pied des activités pédagogiques et ludiques visant l'apprentissage du français. Mais il fallait que ces enfants intègrent le système d'enseignement traditionnel. Pour accompagner cette transition, existent des classes DASPA (dispositif d'accueil et de scolarisation des élèves primo-arrivants) organisées dans les écoles primaires et secondaires pour permettre aux élèves primo-arrivants d'acquérir des notions de base en français et d'activer les autres matières pendant quelques mois avant d'être orientés vers des classes traditionnelles.

Infor-Jeunes Laeken a notamment servi de facilitateurs entre les familles, souvent désorientées, et des établissements scolaires comme l'Institut Imelda à Molenbeek qui organise en son sein une DASPA. Ce rôle de médiation permet notamment de ne pas accentuer les différences sociales et culturelles et de faire en sorte que tout le monde se comprennent bien.

Classe-passerelle

«Nous avions parfois des enfants âgés de 10 ou 12 ans qui n'avaient jamais été scolarisés. Cela tenait à leur appartenance à une communauté de Syriens doms (des gens du voyage originaires du Moyen Orient, ndlr) fortement discriminée et peu intégrée dans le système scolaire en place. Nous avons évité à ces enfants l'orientation prématurée vers l'enseignement spécialisé», explique Chantal Massaer, directrice de l'asbl Infor-Jeunes Laeken, qui craignait cette facilité qu'avait l'administration à sortir ses enfants peu habitués au monde de l'école d'un parcours scolaire «normal». Une fois ces quelques mois en DASPA, un conseil de classe statue sur chaque élève et l'oriente vers une classe traditionnelle.

Ce dispositif est plutôt peu connu du grand public et relève de la volonté d'écoles qui sur dossier reçoivent des moyens spécifiques de la Fédération Wallonie-Bruxelles pour créer de telles classes. Malgré cette action publique -toutefois insuffisante (lire ci-dessous)-, l'action des associations de terrain s'avèrent utiles pour la construction d'un dialogue constructif et en confiance entre les familles et les écoles. Le film «D'Alep à Bruxelles. L'avenir passe par l'école» (ci-dessus), Infor-Jeunes Laeken entend sensibiliser le grand public et le politique à l'importance de cet accueil essentiel des plus jeunes migrants pour en faire des acteurs de notre société.

Des moyens insuffisants

Les classes DASPA relèvent de l'initiative d'écoles primaires et secondaires qui sont susceptibles d'accueillir un public de primo-arrivants dans leurs murs. Une fois leur dossier accepté, elles reçoivent des subsides de la Fédération Wallonie-Bruxelles pour mettre en place cet accompagnement. Mais l'expérience menée à Molenbeek a mis au jour les limites du système.

Les DASPA étant pour la plupart créées dans des établissements accueillant un public déjà en difficulté, elles renforcent un système scolaire déjà fortement dualisé. Mais on manque de places aussi. «Les moyens ne sont pas suffisants en ce qui concerne l'enseignement», déclare Chantal Massaer d'Infor-Jeunes Laeken. « Mais ils sont aussi insuffisants -c'est même uine béance- en matière de santé mentale.» Comment apprendre sereinement quand la tête est encore pleine de traumatismes liées à des conflits et à la violence du voyage souvent non désiré? Pour Infor-Jeunes Laeken, les moyens doivent si pas maintenus, certainement augmentés.

Un débat sur les classes DASPA se tiendra aujourd'hui à 16h au Théâtre National à Bruxelles dans le cadre du Festival des Libertés.