Ultratrail : le coureur Sebastien Chaigneau donne ses conseils

De plus en plus de coureurs se tournent aujourd'hui vers le trail, et sa version XXL, l'ultratrail. On a profité du The North Face Mountain Festival, début septembre, pour faire quelques kilomètres avec l'ultratraileur français Sébastien Chaigneau, et savoir ce qu'il pense de l'engouement pour sa discipline.
par
Camille
Temps de lecture 2 min.

Tout le monde peut-il faire de l'ultratrail?

«Il faut démystifier la discipline: tout le monde peut le faire. Mais il faut être prudent: on n'est pas tous fait pour le faire. On n'a pas tous les mêmes capacités physiques et mentales. Sans entraînement adéquat, il existe donc un véritable risque de blessure. Et quand je dis entraînement, ça ne veut pas uniquement dire courir, ça veut aussi dire savoir prendre le temps de récupérer.»

Tu as commencé en 1998. C'est une rare longévité…

«Beaucoup de ceux avec qui j'ai commencé ont arrêté depuis. C'est la faute aux blessures. Quand on court des ultratrails, il faut écouter son corps. Et il faut parfois savoir dire stop, même si c'est un peu dur au début.»

L'engouement du trail pousse les organisateurs à organiser des courses de plus en plus longues. Ça t'attire?

«Il existe maintenant des courses hors normes. Le Tour des géants fait 340 km, avec 24.000 mètres de dénivelé positif, et se gagne en 75h. La Transpyrenea et ses 895 km se parcourent en environ dix jours. Il y a 100 coureurs au départ, 20 à l'arrivée… Je n'exclus pas de la faire un jour. Mais quand on se lance dans un défi pareil, il faut savoir qu'on va le payer. On va s'user, on risque de se blesser. Il va bien falloir compter un an de récupération derrière. Alors il faut réfléchir avant de se lancer. En ce qui me concerne, je le ferai peut-être un jour. Mais je ne me le fixe pas comme objectif, car je n'ai pas envie de me cramer.»

Certains coureurs semblent inarretables…

«Il y a effectivement des gens qui sont très forts, très complets. Regardez Kilian Jornet (le spécialiste de la discipline, ndlr)… Mais il faut bien voir que des coureurs comme lui sont toujours tranquilles, grâce à leurs capacités physiques. À la fin d'une longue course, ils sont épuisés, bien sûr. Mais ils ne sont pas non plus totalement cuits. Cette année (il a terminé 2e, derrière François D'Haene), il a semblé en difficulté, pour la première fois. Heureusement… Ça montre que tout le monde a des limites.»

Ses conseils pour débuter en ultratrail

1- Marcher. De plus en plus d'amateur de semis ou de marathon passent à l'ultratrail. «C'est une bonne idée, mais il faut avoir une chose bien en tête avant de se lancer: quand on court des ultras de 160 km, il est tout à fait normal de marcher par moments, notamment pendant les montées! Beaucoup ont du mal à l'admettre, et explosent avant d'arriver.»

2- Observer. En trail, et plus encore en ultratrail, rien ne sert de sprinter, car il faudra boucler un (très) long parcours. «Quand le parcours se fait un peu plus technique, dans une descente par exemple, il est intelligent de ralentir un peu, observer le terrain, et anticiper où l'on va poser le pied. On peut ainsi éviter une zone boueuse qui va nous faire perdre en adhérence, un caillou qui nous oblige à décaler le pied au dernier moment… Anticiper est essentiel, car, à défaut, on compense avec un effort musculaire. Sur une petite course, ça n'est pas gênant. Sur des dizaines de kilomètres… C'est autre chose!»

Ph. The North Face

3- Récupérer. «La récupération, c'est la face cachée de l'entraînement. Elle est essentielle. Trop de jeunes coureurs ne comprennent pas que c'est un moment où l'on progresse, où l'on se renforce. Il ne faut pas la négliger, car l'un des grands ennemis du traileur, c'est la blessure. D'ailleurs, beaucoup arrêtent après quelques années, car le corps dit stop. Pour durer, il faut s'économiser.»

4- Profiter. «Les trails se courent en nature, et souvent dans des espaces qui valent le coup d'œil. Il ne faut donc pas toujours chercher à courir le plus vite possible. Ouvrez grand les yeux, profitez des bosquets, des sentiers… Il ne faut pas être juste consommateur et être là pour une médaille ou un tee-shirt de finisher. Et profiter est aussi une façon récupérer.»