Un péage urbain pour Bruxelles ?

Faire payer l'accès à Bruxelles afin de réduire la congestion automobile et financer le développement d'alternatives: l'idée commence à faire son bout de chemin. Mais la simple évocation d'un péage urbain pose plus de question qu'elle n'apporte de réponse. Qui paiera? Quelle sera la zone mise en péage? À quel prix?
par
Camille
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Le problème des files générées par le trafic dans la capitale est un problème connu de longue date. Mais depuis peu, c'est le monde de l'entreprise qui s'en inquiète. «On perd chaque année 35 millions€ en Belgique à cause des files», déplore Ischa Lambrechts, conseiller mobilité du groupement d'employeurs Beci. Il estime qu'une heure de perdu dans les bouchons représente 8,25€ pour un automobiliste, en tenant compte du temps perdu, du coût de la population, et des accidents provoqués. «Il faut diminuer ces coûts», plaide-t-il.

Isabelle Pauthier, la directrice de l'Arau (l'Atelier de recherche et d'action urbaine) dresse elle aussi un constat inquiétant. Outre le problème de mobilité, elle souligne l'impact sur la santé, alors que les seuils limites de particules fines imposés par la Région bruxelloise, déjà peu exigeants, sont régulièrement dépassés.

De 3 à 6 € de péage urbain pour entrer dans Bruxelles

Le bureau d'études Stratec, spécialisé dans les transports, s'est penché sur la question. «Pour être efficace, le prix d'entrée dans Bruxelles devrait être fixé entre 3 et 6€.» Pour Hugues Duchâteau, président du conseil d'administration, ce prix doit servir à reporter une partie de la demande de mobilité vers les transports en public. il a aussi l'avantage de détourner le trafic indésirable aux portes de la métropole. «Cela va aussi diminuer les émissions polluantes ainsi que la pollution sonore», note-t-il. Enfin, un tel système rapporterait près de 300 millions€ par an. «De quoi améliorer l'offre de transports en commun pour leurs usagers», conclut-il.

Besoin d'agir vite

Du côté de Beci, la solution d'un péage urbain ne séduit guère. «Nous préférons une taxe kilométrique intelligente», reprend Ischa Lambrechts, en référence au modèle via Pass qui touche les poids lourds. «Ça n'est rien d'autre que le principe du pollueur-payeur. Celui qui roule beaucoup paye beaucoup, celui qui roule peu, paye peu

L'Arau, en revanche, voit dans le péage urbain une solution. «Il faut faire quelque chose, et vite», plaide Isabelle Pauthier. Elle rappelle que la semaine passée, des parents ont manifesté avec leurs enfants pour rappeler les risques que les particules fines font peser sur leur santé. «La région se doit d'agir. Malheureusement, elle ne peut pas compter sur la solidarité des autres régions. Ces dernières s'arrangent très bien de la situation actuelle, qui est, pour elles, une internalisation des profits, et une externalisation des coûts. Le péage urbain peut donc être une solution.»

Du côté des politiques, on avance prudemment. Le MR bruxellois a convoqué un colloque sur la question afin «d'analyser les différents points de vue.» Certaines voix s'y disent déjà opposées, quand d'autres souhaitent consulter. "Il faut avancer sans dogmatisme vers la recherche d'une solution durable. L'instauration d'un péage urbain, un tabou il y a quelques années, rassemble de plus en plus d'adeptes", souligne Boris Dilliès, le vice-président du MR bruxellois. "Le monde politique, tous partis confondus, doit pouvoir en tenir compte."