Macron-Le Pen au second tour de la présidentielle, le choix de la France

Le centriste pro-européen Emmanuel Macron et la candidate de l'extrême droite anti-Europe Marine Le Pen, se sont qualifiés dimanche pour le second tour de la présidentielle française le 7 mai, un duel marquant le rejet des partis classiques.
par
Nicolas
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Ce scénario rebat les cartes de la politique française : c'est la première fois depuis 1958 que la droite est absente du second tour, et la première fois qu'aucun des deux grands partis qui ont dominé la vie électorale depuis près d'un demi-siècle, le parti de droite Les Républicains et le Parti socialiste, n'y est présent.

«On tourne clairement aujourd'hui une page de la vie politique française», a commenté Emmanuel Macron, ancien ministre de l'Economie âgé de 39 ans, au coude à coude arrivé avec la cheffe du parti Front national, 48 ans. Sur le site officiel du ministère français de l'Intérieur, les deux candidats se disputent la tête, les résultats avançant. Tous les deux tournent autour des 23%.

L'entourage de Marine Le Pen a pour sa part salué «une victoire historique pour les patriotes et les souverainistes». Reste cependant le second tour le 7 mai prochain, où tous les sondages l'ont toujours annoncée battue.

Un résultat "historique" pour le FN

AFP / J. Saget

Des deux vainqueurs, la leader frontiste s'est exprimée en premier. Devant ses partisans réunis dans son fief électoral d'Hénin-Beaumont, elle a salué un «résultat historique» et s'est profilée comme la «candidate du peuple» contre «le système».

La présidente du FN a commencé son intervention en exprimant «son honneur, son humilité, sa reconnaissance» aux Français qui lui ont fait confiance dans l'isoloir dimanche.

Elle s'est également réjouie de constater que «le grand débat va enfin avoir lieu» et a appelé «tous les patriotes sincères» à se joindre à elle. «Les Français doivent saisir l'opportunité historique qui s'ouvre, celui du combat contre la mondialisation», a-t-elle lancé.

La députée européenne a également décoché ses premières flèches vers son futur adversaire lors du second tour, Emmanuel Macron, «l'héritier de François Hollande».

L'ascension fulgurante de Macron

Il s'est fait attendre mais Emmanuel Macron a à son tour pris la parole devant ses soutiens. «Merci à vous. Ce dimanche 23 avril, le peuple de France s'est exprimé. Alors que notre pays traverse un moment inédit de son histoire, marqué par le terrorisme, les défis économiques et écologiques, les souffrances sociales, il y a répondu de la plus belle manière, en allant voter massivement», a d'emblée déclaré le candidat.

AFP / P. Kovarik

«Je mesure l'honneur et l'insigne responsabilité qui me revient», a-t-il ajouté en faisant applaudir les candidats malheureux, dont il sait «la déception de celles et ceux qui les soutenaient, et la leur».

«En une année, nous avons changé le visage de la vie politique française. Je n'oublierai jamais la volonté opiniâtre, l'énergie exigeante que des milliers d'entre vous ont déployée. Depuis un an, partout en France, vous avez pris votre part du destin national, montré que l'espoir n'était pas un rêve, une lubie, un rêve, mais une volonté bienveillante. Vous avez donné vos jours et quand ils ne suffisaient pas, vous avez donné vos nuits. Ce soir, je vous le dois et je le sais», a poursuivi Emmanuel Macron.

Le leader du mouvement "En Marche!", qu'il a créé voici un an, sait qu'il va devoir rassembler pour pouvoir vaincre le Front National au second tour. «J'œuvrerai dans les quinze jours qui viennent pour que nous puissions ensemble rassembler le plus largement possible autour de ma candidature. Le défi à partir de ce soir n'est pas d'aller voter contre qui que ce soit, c'est de décider de rompre jusqu'au bout avec le système qui a été incapable de répondre aux problèmes de notre pays depuis plus de trente ans. Le défi est d'ouvrir une nouvelle page de notre vie politique et d'agir pour que chacun, avec justice et efficacité, puisse trouver sa place en France et en Europe», a-t-il encore dit en assurant qu'il s'apprête à construire une majorité de gouvernement, «faite de nouveaux visages, de nouveaux talent où chacun pourra avoir sa place.»

Des soutiens à gauche et à droite

AFP / C. Hartmann

De nombreux ténors de la droite ont fait part de leur soutien au centriste, après la défaite de leur candidat François Fillon, arrivé troisième avec 20% des voix.  Ce dernier a déclaré depuis son QG de campagne qu'il votera pour Emmanuel Macron dans deux semaines. Le député de Paris a dénoncé «la violence» et «l'intolérance» dont se rend coupable selon lui le Front National, parti d'extrême droite dont la présidente Marine Le Pen s'est qualifiée pour le second tour de l'élection présidentielle. Il estime que le programme du FN mènerait la France «à la faillite» et l'Europe «au chaos».

Le Premier ministre du gouvernement socialiste, Bernard Cazeneuve, a également appelé à voter Macron.

Très loin derrière vient le candidat socialiste Benoît Hamon, qui n'aurait recueilli que 6,3%, revers cinglant pour le parti au pouvoir. Il a assumé sa part de responsabilité dans sa défaite. L'ancine ministre de l'Éducation nationale a appelé à voter pour Emmanuel Macron face à Marine Le Pen, préférant «un rival politique à une ennemie de la République», et ce même "s'il n'est pas à gauche".

Mélenchon laisse le choix à ses partisans

Selon les estimations, au terme d'un match à quatre serré, Jean-Luc Mélenchon (19,2%) est lui aussi  éliminé.

AFP / B. Guay

Le candidat de La France Insoumise (gauche radicale) s'est refusé dimanche soir à donner une consigne de vote à l'issue du premier tour de l'élection présidentielle. Le candidat d'extrême gauche estime que le duel Macron/Le Pen qui s'annonce au second tour est de nature à faire jubiler «les médiacrates et les oligarques».

S'exprimant devant ses partisans, le député européen a souligné qu'il ne disposait d'aucun mandat pour donner une consigne de vote aux «insoumis». Il a appelé son mouvement à rester groupé dans l'optique du second tour et au-délà. «Nous restons fidèles à la devise: Liberté, Egalité, Fraternité», a-t-il conclu devant ses supporters.

Une participation meilleure qu'annoncée

Lors du premier tour tenu sur fond de menace terroriste, la participation a avoisiné les 70%, un des meilleurs niveaux depuis quarante ans, selon le ministère de l'Intérieur.

Le niveau de mobilisation des 47 millions d'électeurs était l'une des clés du scrutin, alors qu'un sur quatre se disait encore indécis ces derniers jours.

Trois jours après une attaque revendiquée par le groupe jihadiste État islamique sur l'avenue parisienne des Champs-Elysées, qui a coûté la vie à un policier, 50.000 policiers et 7.000 militaires avaient été déployés pour assurer la sécurité du scrutin.