Après les Oscars, les Grammys accusés de racisme

Après Hollywood et les Oscars, c'est à présent l'industrie musicale et ses prix les plus prestigieux, les Grammys, qui se retrouvent au cœur d'une polémique et accusés d'un biais racial.
par
Marie
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La superstar afro-américaine Beyoncé n'est une nouvelle fois pas parvenue dimanche à décrocher les principales récompenses aux Grammy Awards avec son album concept «Lemonade», pourtant universellement acclamé.

C'est la diva britannique Adele qui a récolté les prix les plus prisés pour son album de balades écorchées «25». Elle avait déjà remporté le tiercé de principaux Grammys pour «21» et entre ainsi dans l'histoire de ces prix. Mais, fan déclarée de «Queen B», elle s'est jointe dimanche, ses cinq prix en mains, à ceux qui ne s'expliquaient pas que leur idole ne soit toujours pas consacrée et ne reparte qu'avec deux trophées plus mineurs (meilleure vidéo et meilleur album urbain contemporain).

Que doit-elle faire?

«Qu'est-ce qu'il faut qu'elle fasse pour gagner l'album de l'année?», a déploré Adele. Sur la scène du Staples Center, elle s'était lancée dans un vibrant hommage à Beyoncé, assurant que «Lemonade» était «exaltant» et «monumental».

Le triomphe d'Adele survient un an après que la pop-star Taylor Swift eut aussi récolté les principaux prix pour son album «1989». Elle avait évincé le rappeur noir Kendrick Lamar et son opus «To Pimp A Butterfly», encensé par la critique et dont le titre «Alright» est devenu un hymne du mouvement Black Lives Matter.

GrammysSoWhite

Après la polémique sur les Oscars trop blancs des deux dernières années (suivie cette année d'un record de nominations d'acteurs noirs) une nouvelle controverse est en train d'émerger: les Grammys sont-ils eux aussi teintés de racisme? Le New York Times a frontalement déclaré lundi: «GrammysSoWhite: les prix vont-ils regarder en face leur problème racial?»

Frank Ocean, le pionnier du hip-hop introspectif dont le premier album en 2013 s'est incliné face au folk anglais de Mumford & Sons, a choisi de ne même pas se porter candidat aux Grammys avec son album suivant, «Blonde».

Après la cérémonie de cette année, le musicien a écrit une lettre ouverte aux organisateurs des Grammys leur demandant de discuter du «biais culturel et des dégâts pour les nerfs en général» occasionnés par le spectacle télévisé de dimanche.

«Ça fait mal»

Les Grammys, décernés par le vote de 13.000 professionnels de la musique membres de l'Académie du disque (Recording Academy) n'ont toutefois pas complètement ignoré Beyoncé: lauréate de 22 Grammys sur l'ensemble de sa carrière, elle est l'une des artistes les plus récompensées de l'histoire de ces prix.

Si Stevie Wonder est recordman ex-aequo pour avoir été sacré album de l'année trois fois, le prix principal a été particulièrement difficile à décrocher pour les Afro-Américaines: seules Natalie Cole, Lauryn Hill et Whitney Houston l'ont conquis.

«‘Lemonade' parle vraiment de la manière dont les femmes noires sont traitées historiquement par la société», alors «d'une certaine façon ça colle qu'elle ait été laissée en plan», estime LaKisha Simmons, professeure d'histoire et d'études féministes à l'Université du Michigan. «Beyoncé va s'en remettre», mais «pour le reste d'entre nous ça fait mal parce que ça semble presque dire 'restez à votre place'«, a-t-elle ajouté.