Le PDG d'ExxonMobil nommé chef de la diplomatie de Trump

Le président élu américain Donald Trump a nommé à la tête de sa diplomatie, Rex Tillerson, le PDG du géant pétrolier ExxonMobil, qui a des liens étroits avec la Russie.
par
Pierre
Temps de lecture 3 min.

M. Tillerson, 64 ans, qui connaît personnellement le président russe Vladimir Poutine, devrait être chargé de normaliser les relations avec la Russie, mises à mal par l'annexion de la Crimée et le différend entre Washington et Moscou sur la guerre en Syrie.

"Je ne peux imaginer une personne mieux préparée et aussi dévouée, pour servir en tant que secrétaire d'Etat à ce moment crucial de notre histoire", a déclaré M. Trump.

"M. Tillerson sait comment gérer une organisation de dimension mondiale et comment s'orienter dans l'architecture complexe des affaires du monde et de différents dirigeants étrangers", souligne son communiqué, justifiant le choix inhabituel d'un homme d'affaires de l'envergure de M. Tillerson, pour ce poste.

"En tant que secrétaire d'Etat, il sera un avocat ferme et lucide des intérêts nationaux vitaux de l'Amérique et il aidera à changer des années de mauvaise politique étrangère et d'actions qui ont affaibli la sécurité et la place de l'Amérique dans le monde."

La confirmation de la nomination risque d'être compliquée au Congrès par les liens de M. Tillerson avec la Russie, accusée par la CIA d'avoir interféré dans l'élection américaine en faveur du milliardaire.

Un ami de Poutine

Carrure impressionnante, chevelure blanche, ce Texan de 64 ans, toujours tiré à quatre épingles, n'a aucune expérience gouvernementale mais sa proximité avec le président russe a sans doute été déterminante dans le choix Donald Trump.

Une des priorités du président élu est de réchauffer les relations russo-américaines, considérablement refroidies depuis l'invasion de la Crimée en 2014 par la Russie.

"Il est l'Américain qui a eu le plus d'interactions avec Vladimir Poutine à l'exception d'Henry Kissinger", dit de lui John Hamre, de l'institut d'études Center for Strategic and International Studies (CSIS) dont M. Tillerson est membre.

MM. Tillerson et Poutine ont fait connaissance dans les années 90 quand le premier supervisait un projet d'Exxon sur l'île de Sakhaline et ont renforcé leurs liens quand le second a pris le pouvoir après la démission de Boris Eltsine le 31 décembre 1999.

Cette "amitié" sera couronnée par un accord historique signé en 2011 entre le géant énergétique public russe Rosneft et Exxon pour explorer et forer ensemble l'Arctique et la Sibérie.

Une nomination qui inquiète

En tant que secrétaire d'Etat, il devra gérer le dossier du nucléaire iranien, les sanctions contre la Russie, les querelles avec la Chine et le dossier syrien.

Il sera aussi très attendu sur le climat après avoir résisté en sa qualité de patron d'ExxonMobil à réduire les investissements dans l'exploration de nouveaux puits pétroliers pour lutter contre le réchauffement climatique.

Plusieurs Etats américains dont New York, soutenus par des militants écologistes, ont ouvert des enquêtes contre le groupe.

Cette nomination "est inimaginable", dénonce l'ONG environnementaliste 350.org. "Nous ne pouvons laisser M. Trump nommer le plus grand groupe pétrolier du monde en charge de notre politique internationale sur le climat. M. Tillerson est peut-être un ami de M. Poutine, mais ce n'est pas un ami de la planète", ajoute l'ONG qui a mis en ligne une pétition contre cette désignation.

S'il n'est pas rompu aux usages et protocoles diplomatiques, M. Tillerson est néanmoins habitué à rencontrer les grands de ce monde pour défendre les intérêts d'Exxon, présent dans plus d'une cinquantaine de pays, du Qatar à la Papouasie-Nouvelle-Guinée en passant par l'Arabie saoudite. Il a par exemple retiré Exxon du Venezuela suite à des désaccords avec l'ex-président Hugo Chavez.

Sa position d'actionnaire d'Exxon, dont il détient plus de 150 millions de dollars de titres d'après des documents boursiers, pourrait générer des conflits d'intérêts car ses décisions en tant que ministre des Affaires étrangères seraient de nature à influencer le cours du titre. Une levée des sanctions contre la Russie provoquerait ainsi très certainement une flambée de l'action Exxon.

Photo  AFP / Ben Stansall