Au Kivu, de la musique et de la danse contre la guerre

par
Laura
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L'Est du Congo tente d'oublier les 20 ans de guerre qui viennent de ravager la région. tout au long du weekend, Goma, la capitale du Nord-Kivu a vibrer au rythme du festival Amani (Paix, en swahili).

On conait le Nord-Kivu pour les guerres et qui ont frappé la région pendant des années et leurs conséquences sur les populations civiles. "Mais le Kivu, c'est bien plus que la guerre", souligne Guillaume Bisimwa, directeur du festival Amani, l'évenement musical le plus important de la région. "Il y a ici de nombreux artistes qui gagnent à être connus, des gens qui tentent de faire du bien à la région, un emsemble de bonnes volontés qui peut faire évoluer les choses dans le bon sens."

Ce foisonnement culturel a donné lieu, en 2013, à la première édition du festival. "Notre objectif est de promouvoir la paix, en aidant les habitants de la région (République démocratique du Congo, Rwanda, Burundi) à se rencontrer, se découvrir. Il y a de nombreux traumatismes suite aux guerres des dernières années. Ce moment de fête doit faire oublier les divisions ethniques et mettre en avant ce qui nous réunit" ajoute Guillaume Bisimwa. Pour créer ce sentiment d'unité, le festival mise sur une programmation locale et internationale. Ce weekend, aux côtés des nombreux artistes régionaux, les spectateurs ont pu écouter des artistes connus mondialement, comme Nneka et Ismaël Lo.

Difficultés d'organisation

Organiser un festival dans une région qui sort de 20 ans de conflit, sans même savoir si ceux-là sont bien terminés, n'a rien d'une synécure. Les matériel est venu de Kigali, la capitale du Rwanda voisin, seule ville a proposer les équipements nécessaires à la tenue d'un tel événement. Il faut également discuter avec les artistes, pas toujours sereins à l'idée de se rendre dans la région.

Surtout, le festival se doit d'assurer sa pérennité. Les organisateurs redoutent qu'une prise de position dans un sens ou l'autre ne remette en cause les prochaines éditions. D'où le choix de "se distancier" autant que possible de tout mouvement politique ou religieux. Et pas question de se prononcer sur le débat qui agite en ce moment le pays, à savoir la possibilité d'organiser ou non l'élection présidentielle prévue en novembre prochain. Les autorités régionales, invitées au titre de leur collaboration, sont appelées à limiter autant que possible leurs interventions, pour tuer dans l'oeuf toute accusation de parti pris. La plupart des chanteurs évitent d'eux même de tenir des propos qui pourraient mettre l'avenir du festival en danger.

Ville en fête

Jusqu'ici, ce modèle fonctionne. Le festival a bien dû être reporté une fois, en 2013, quand la rebellion M23 bombardait la ville. Depuis l'an dernier, les concerts sont pratiquement complets chaque soir. "Ce weekend encore, c'était la fête", se rejouit Claude, un festivalier qui vient de vivre sa seconde édition. "Nous les jeunes, on vient entre amis, d'autres viennent en famille. C'est très convivial."

Cela contribuera t-il au retour de la paix dans la région? "Il y a beaucoup de problèmes ici, beaucoup de pauvreté, ca peut servir de pretexte à l'émergence d'une nouvelle rébellion", reprend Claude, inquiet. Mais d'autres voix veulent croire à une évolution positive. Séraphin Cormoran, le chef des scouts locaux, est des plus optimistes. "Quand on a dansé ensemble, bu des bières ensemble, on ne peut plus se battre les uns contre les autres. Ce festival nous fait du bien." 

20 ans de conflit

Le génocide rwandais de 1994 n'a pas été sans conséquence sur la région du Kivu. La fuite de nombreux génocidaires vers la RDC voisine a envenimé les relations entre la RDC et le Rwanda voisin, apportant guerre, violences sexuelles, et difficultés en tout genre. Pour ne rien arragner, l'exploitation de minerais précieux (notamment le coltan, un mélange nécessaire à la fabricatin de matériel électronique), et les revenus qui en découlent, exacerbent les tensions. En novembre 2013, le dernier groupe rebelle d'importance, le M23, a annoncé cesser les hostilités après une opération menée conjointement par les forces armées congolaises et la Monusco, la force onusienne déployée pour stabiliser le pays. Les rivalité communautaires et politiques restent toutefois présentes. Mais les habitants de la région espèrent sortir, une bonne fois pour toute, de 20 ans de guerre.

Assurer la sécurité des festivaliers

Element peu habituel pour un festival, Amani de déroule en journée. Une façon de favoriser la venue d'un public familial. Mais surtout de s'assurer que les festivaliers puissent rentrer chez eux en sécurité après la fête. "Le soir, certaines zones de Goma ne sont pas encore sures. Tant que la situation sera celle-ci, pas question d'organiser un festival en soirée", souligne Guillaume Bisimwa, directeur du festival.

 

Ph. C. Thirion