Bruxelles: Les migrants remercient les Belges

par
Laura
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Ils étaient presque 1.000 hier -selon les bénévoles- à dormir au parc Maximilien. Hommes, femmes, enfants, qu'ils soient Syriens, Irakiens, Afghans ou même Somaliens, s'entassent et se succèdent depuis près d'une semaine dans des tentes au confort précaire. À leurs côtés, des centaines de bénévoles se sont organisés tout au long du week-end pour rendre leurs conditions de vie plus humaines. Une mobilisation qui rend peu à peu le sourire aux migrants, exténués par un parcours chaotique et inhumain.

Les bénévoles

"Je remercie les Belges en particulier, et tous les Européens, pour leur accueil." Hikmet est arrivé au Parc Maximilen avec toute sa famille il y a une semaine. Depuis, il dort sous tente avec sa femme, Hoda, et leurs quatre enfants: Ahmed âgé de 10 ans, Zineb de 7 ans, Djouma de 4 ans et Walid de 2 ans. "Les enfants sont très fatigués. On essaie de les occuper du mieux que l'on peut." Hikmet avait un commerce en Syrie, mais ils ont dû tout quitter. "Le voyage a été long et pénible", se souvient-il. "Ce qui a été le plus dur, c'est la traversée en bateau." Ils ont d'abord été en Algérie où ils sont restés un mois avant d'entamer la traversée vers l'Espagne. Ils sont ensuite passés par la France pour arriver jusqu'en Belgique. Ils espèrent avoir enfin un logement convenable aujourd'hui.

Djouma, 4 ans, et Ahmed, 10 ans, les fils d'Hikmet

L'humiliation tout au long du parcours

Pour Fatma et Salam, l'élément déclencheur a été la mort de leur fils. Ce dernier a été arrêté en Irak et poignardé. "Nous avions payé la rançon. Pourtant, on l'a retrouvé mort", se souvient cette maman avec émotion. Quand on leur demande comment s'est déroulé le trajet jusqu'ici, ils répondent sans hésitation "dans l'humiliation". "En Turquie, nous avons reçu des passeports falsifiés pour pouvoir passer la frontière. Les passeurs nous ont volé nos passeports irakiens en disant qu'on n'en aurait plus besoin. Heureusement, j'ai encore des papiers qui prouvent que nous sommes irakiens", explique Fatma. Avec son mari, elle est arrivée jeudi et a un rendez-vous à l'Office des étrangers aujourd'hui. "Nous avons 60 et 53 ans", raconte-t-elle. "Nous n'avons plus l'âge de dormir sous tente. Nous avons eu froid toute la nuit, et on nous a volé notre GSM à notre arrivée. Mais l'accueil, ici, est plus humain."

Pour Ahmed, qui est arrivé d'Irak en passant notamment par la Turquie, la Grèce, la Macédoine, le pire des traitements, il l'a vécu en Hongrie. "Là-bas, c'était l'horreur. Ici, comparé à la Hongrie, c'est parfait, même si nous avons froid la nuit."

«Vivre en paix»

Alia, son mari et leur quatre enfants, âgés de 8 à 19 ans, sont quant à eux arrivés samedi. "Le meilleur accueil que l'on a eu, c'est ici en Belgique." Durant leur trajet de la Syrie au parc Maximilien, ils se sont sentis humiliés et ont beaucoup souffert. "Mais heureusement, nous y sommes arrivés", raconte Alia, presque soulagée.

Presque car, comme tous les migrants présents au parc Maximilien, leur combat n'est pas fini. Aujourd'hui, ils feront la file devant l'Office des étrangers. "Nous ne demandons qu'une chose, c'est de vivre en paix", explique-t-elle. Avec sa famille, elle a parcouru le chemin de la Syrie à la Belgique à pieds. "Je ne sais pas par où nous sommes passés. Mais je sais juste que nous avons pris un bateau à un moment", raconte-t-elle. Son mari, ses enfants et elle vivaient dans la banlieue de Damas. "La guerre était devenue insupportable. Nous devions faire un choix, et nous avons choisi de venir ici au péril de notre vie."

Qui sont-ils ?

Qui sont ces réfugiés qui fuient leur pays pour trouver un avenir meilleur en Europe? "Nous sommes des intellectuels", s'empresse de nous dire Fatma, venue d'Irak. "Nous avions un travail. J'étais enseignante dans un lycée de secondaire, et mon mari était ingénieur civil." Pour elle, c'est important de souligner qu'eux et leurs enfants ont fait des études, peut-être pour prouver à ceux qui en douteraient, qu'ils peuvent trouver leur place dans notre société. "J'ai un fils laborantin qui vit en Finlande et un autre qui travaille dans l'économie au Luxembourg."

Fatma et Salam

Ahmed était quant à lui agent de police en Irak. "Jusque quand je me suis rendu compte qu'on nous envoyait en première ligne, sur le front, et que je pouvais me faire tuer à tout moment." En témoigne sa jambe dans laquelle se trouvent encore logés quelques éclats de balle. De leur côté, Hikmet et sa femme ont dû abandonner le magasin qu'ils tenaient depuis des années en Syrie. "Ils avaient un travail, une maison, une famille", nous explique notre traducteur-bénévole Mohamed. "Mais l'essentiel, aujourd'hui, c'est qu'ils ne sont plus sous les bombes et à la merci des passeurs."

Ahmed

Ph. Maïté Hamouchi