James Franco: "les auteurs ne doivent pas être malheureux pour être bons"

par
Laura
Temps de lecture 3 min.

Idole des filles. Professeur d'université. Etudiant. Star de cinéma. Peintre. Réalisateur. Ce ne sont que quelques-unes des dizaines de casquettes que James Franco peut porter. Et il écrit aussi, ce qui tombait bien pour son rôle dans ‘Every Thing Will Be Fine', le nouveau film de l'icône de l'arthouse Wim Wenders. Franco y incarne un acteur débutant, qui a tout d'un coup énormément de succès après avoir provoqué un accident de voiture mortel.

L'auteur en vous a dû trouver cette histoire intéressante?

«Oui, le film pose la question suivante: ‘L'auteur est-il devenu meilleur grâce à la tragédie qu'il a provoquée?' Le frère du garçon qu'il a renversé et tué le pense en tout cas, et lui en veut beaucoup. Maintenant, je ne sais pas s'il est nécessairement vrai qu'un artiste a besoin de tragédies pour être bon. Mais c'est un exercice mental intéressant. Surtout la question de savoir s'il est éthique de s'inspirer du malheur des autres.»

Le faites-vous parfois?

«J'utilise certainement des éléments de ma propre vie -tragique ou pas. Mais quand il s'agit de la vie de quelqu'un d'autre, c'est bien sûr plus délicat. On se demande toujours: ne vais-je pas blesser cette personne si j'utilise son histoire dans mes livres? Mais Amy Hempel, un de mes professeurs à l'université, disait toujours: si vous hésitez, écrivez quand même votre histoire. Ne la publiez pas, mais écrivez-la. Car on ne sait jamais ce qui peut se passer: cela ne pose peut-être aucun problème à la personne en question. Ou si elle est déjà âgée, vous pouvez attendre qu'elle décède.»

Comment êtes-vous entré en contact avec Wim Wenders?

«Il m'a contacté. Quand un grand réalisateur comme Wim Wenders vous appelle, vous êtes bien sûr tout de suite intéressé. Il voulait me rencontrer. Mais il était très occupé: il était en train de monter un film. L'idée était qu'il prenne l'avion pour passer quelques heures à New York afin de faire connaissance. Mais ce jour-là, je devais justement donner mon cours d'écriture de scénario à l'Université de New York. J'ai donc invité Wim à me rejoindre dans l'auditoire. Il était là pendant que mes étudiants lisaient leurs scénarios, et il leur a même fait des remarques et donné de bons conseils. Ce fut une expérience inoubliable pour lui! Ensuite, nous sommes allés à mon hôtel, et j'ai longuement interviewé Wim pour Playboy Magazine. C'est ainsi que nous avons tout de suite appris à très bien nous connaître. J'étais déjà fan de ses films, mais après cette conversation, je savais avec certitude que nous allions parfaitement nous entendre aussi.»

Enseigner, étudier, écrire, jouer la comédie... Ne vous arrêtez-vous jamais un instant?

«Pas vraiment non. (rires) Savez-vous ce que c'est: les plateaux de cinéma peuvent parfois être terriblement ennuyeux pour un acteur. La plupart du temps, vous êtes là à attendre que les lumières et la caméra soient installées. Si vous restez là à vous tourner les pouces, vous perdez vite une année entière de votre vie. Je préfère utiliser ce temps à bon escient. Entre les scènes, je suis plongé dans les livres, ou j'écris.»

Mais n'est-il pas difficile de trouver de l'inspiration quand on passe autant de temps sur les plateaux de tournage plutôt que dans le monde réel?

«Non. Beaucoup d'auteurs que j'admire, ont utilisé leurs autres jobs comme inspiration pour leurs histoires. Raymond Carver avait deux autres jobs. Personne ne lui demandait où il allait chercher son inspiration. Il écrivait sur les ouvriers qui l'entouraient, sur le milieu dans lequel il travaillait lui-même! Je le fais aussi: j'utilise mon travail d'acteur comme source de fiction.»