Soprano: Melting-pot complet

Loin du rap lyrical pur qu'il proposait à ses débuts, Saïd M'Roumbaba alias Soprano nous revient transfiguré dans son nouvel album, «Cosmopolitanie». Son concept? Un mélange de genres et de contenus où des touches africano-techno-electro-piano laissent transparaître son ouverture à de nouveaux champs musicaux et à ses nouvelles influences qui s'étendent de London Grammar à Bruno Mars en passant par Stromae ou encore Magic System.
par
Laura
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Comment expliquer ce virage depuis votre premier album solo («Puisqu'il faut vivre», 2007)?

«Tout était calculé. C'était important pour moi de faire passer le message, que j'ai depuis longtemps, qui est de vouloir réunir les gens, surtout après les derniers événements. Il fallait que les morceaux soient artistiquement différents sur le fond et sur la forme pour que le mélange des gens, des genres et des cultures soit complet. Le titre «Cosmopolitanie» était parfait pour expliquer ma philosophie de la musique et de la vie.»

Même au niveau du contenu, vous oscillez entre thèmes légers et lourds de sens.

«Le contenu est trop important que pour le négliger, même dans un morceau léger. Aujourd'hui malheureusement, les thématiques n'existent presque plus dans le rap. Quand tu en fais, on te traite de vieux ou d'intello.»

C'est un regard critique que vous posez sur ‘la nouvelle école'?

«Je pense qu'il faut de tout, il faut vivre avec son temps. Beaucoup de jeunes aiment l'entertainment à l'américaine, ils ont besoin de s'amuser, de s'évader. Donc il faut ce style de rap aussi pour un certain public. Mais il faut aussi d'autres rappeurs comme REDK ou Youssoupha qui ont une véritable recherche dans l'écriture. Aujourd'hui, les jeunes se détournent du hip hop et cette culture prend un coup. Le problème, c'est que nous sommes obligés de ne pas lâcher l'affaire. Si tu arrives à faire des morceaux qui ont une forme qui attire les jeunes et qui contiennent un message, c'est gagné.»

Ce message est d'ailleurs souvent destiné à la jeunesse.

«Exactement. Je pense qu'il y a une rupture entre les jeunes et la société. Quand on entend l'histoire de Coulibaly et qu'on analyse le processus qui l'a mené à faire toutes ses conneries, on voit que c'est un jeune des quartiers qui était perdu et qui a été récupéré. Les jeunes ont besoin d'entendre autre chose que de la vulgarité et des conneries. Il faut se concentrer sur les problèmes les plus importants et non sur tous ceux qui sont récupérés par les politiques, comme le port de la burqa. C'est la jeunesse qui doit être ciblée et je vais aller encore plus loin, c'est celle d'une tranche d'âge particulière. Il faut s'attaquer aux plus jeunes, ceux à qui on peut encore inculquer des valeurs qui leur permettront de prétendre à un avenir plus radieux. À part footballeurs ou rappeurs, il y a trop peu de gens qui ont réussi et qui se revendiquent des quartiers. Les jeunes ont besoin d'exemples positifs de réussite car les exemples de réussites matérielles et négatives, ils en ont des tonnes.»

Pour revenir à l'album, vous avez rompu avec la mélancolie?

«Comme je dis à la fin, est-ce qu'on guérit de la mélancolie? Je ne pense pas. Mais quand je vois ma vie, mes enfants, ma femme, ma famille et mes amis, je n'ai pas le droit de dire que je suis malheureux. Ces gens-là sont là pour que je ne le sois pas.»

Et vous le chantez ce bonheur avec une chanson pour votre dernière fille!

«Après «Inaya» pour ma première fille, «Accroche-toi à mes ailes» pour mon fils, maintenant «Luna» pour ma dernière. Elle comprendra qu'elle m'en a fait baver (rires) mais elle comprendra d'où vient son nom, que c'est une référence à l'album que j'ai fait avec Psy 4 «Enfants de la Lune», que l'islam a un rapport avec la Lune, etc. Donc ils auront un héritage et c'est important. Je leur laisse quelque chose qu'ils auront encore après ma mort et qui leur donnera de la force.»

Un petit mot sur vos projets futurs en solo et avec Psy 4 de la rime?

«Mon prochain album sera certainement plus lyric. Sinon, on se concentre sur la tournée et mon concert à Forest National le 30 avril. Et je suis aussi concentré sur la marque d'habits que j'ai lancée.»