Martin Michaud : Le maître québécois du thriller

par
Maite
Temps de lecture 5 min.

C'est un thriller d'une puissance exceptionnelle que nous offre Martin Michaud dans «Sous la surface». Cet auteur québécois connaît un succès fulgurant au Québec grâce à ses trois premiers polars. Chez nous, il conquiert les lecteurs avec son quatrième roman avant de nous dévoiler, en 2015, ses trois précédentes enquêtes.

Pourquoi nous présenter «Sous la surface» avant vos trois premiers polars?

«La raison est simple. Quand on a voulu commercialiser la série du sergent-détective Victor Lessard (‘Il ne faut pas parler dans l'ascenseur', ‘La chorale du diable' et ‘Je me souviens', ndlr), on voulait le faire en rafale. Il nous semblait donc naturel de commencer en Belgique et en France avec ‘Sous la surface' qui est un hors-série.»

Avec vos trois premiers polars, vous avez gagné de nombreux prix littéraires. Que racontent-ils?

«C'est le personnage qui m'a permis de conquérir un assez vaste lectorat au Québec. Victor Lessard est un enquêteur qui revient dans chacun de mes romans de la série. Ce sont des enquêtes qui se passent un peu partout dans le monde mais qui sont localisées à Montréal. J'aime penser que Montréal est perçu comme un personnage à part entière, un peu à la manière de l'auteur belge Simenon. Avec ‘Sous la surface', c'est différent car ça se passe aux États-Unis. La trame de ce roman ne pouvait pas exister autre part qu'aux États-Unis.»

Vous y dénoncez le système politique américain.

«Je ne sais pas si je le dénonce mais je me sers de ses travers pour bâtir mon intrigue et, d'une certaine manière, pour essayer de montrer aux lecteurs qu'à partir de l'endroit où l'on regarde, on peut avoir un degré ou un niveau de lecture différent. Quand on est en démocratie, on pense que les conflits et les attaques sont parfois vicieux et trop personnels. En réalité, tout ça est encadré. J'essaie donc de montrer que sous la surface, il y a des luttes plus profondes, plus malsaines. Au fond, mettre un président en place, c'est un travail de longue haleine. Il y a des personnes dans l'ombre qui s'emploient à essayer d'éliminer les obstacles.»

Pourquoi vous êtes-vous intéressé à la théorie du complot?

«C'est une fascination qui me vient de l'adolescence. Mon père s'intéressait beaucoup à l'assassinat du président Kennedy. C'est une passion qu'il m'a transmise. Je me suis documenté pendant des années sur les frères Kennedy. Dans ‘Sous la surface', il y a un événement qui a été vécu par le plus jeune des frères, Ted. Il était dans une voiture qui n'était pas la sienne, avec une femme qui n'était pas la sienne, quand la voiture a plongé dans une rivière. La femme meurt noyée et Ted Kennedy ne rapporte l'événement que plusieurs années plus tard. Je me suis servi de ce fait divers comme le moteur de mon intrigue. C'est un miroir, une espèce de clin d'œil à cet événement.»

Dans votre livre, votre héros est une héroïne.

«Je prends beaucoup de plaisir dans mon écriture, et en particulier dans ce hors-série, à placer des personnages ordinaires dans des situations extraordinaires. On pourrait croire que Leah n'est pas un personnage ordinaire car elle est une ancienne top model, la femme du candidat pressenti à la prochaine élection présidentielle. Mais elle est, à la base, ordinaire. Je mets donc un personnage ordinaire dans une situation extraordinaire et dans un très court laps de temps. Et de là, j'observe.»

Vous choisissez un jour important de la politique américaine, le Super Tuesday.

«Je trouvais que raconter une histoire dans ce court laps de temps ajoutait de la tension dramatique, et qui plus est à la veille d'un jour aussi fatidique de la politique américaine.»

On retrouve également la question de la politique environnementale dans votre roman. Une question qui vous touche personnellement?

«Je pouvais coller l'étiquette que je voulais au candidat. J'avais donc envie de mettre en avant mes préoccupations personnelles. Je trouvais utile de parler d'un candidat qui aurait développé un ‘plan vert' qui incarne un grand changement. Il devait avoir quelque chose de très fort dans son programme pour que son rival, au moment où cela se présente, négocie et récupère ce plan.»

Ce qui ressort dans votre livre, c'est qu'on ne connaît jamais vraiment une personne.

«Effectivement, on comprend dans le dernier chapitre de mon roman qui est vraiment Leah et que son image n'est pas aussi lumineuse. Je voulais placer une trappe en-dessous du lecteur et le laisser tomber dans le vide. Il peut ainsi continuer à laisser aller son imagination.»

La Foire du livre met à l'honneur cette année le Québec, aura-t-on le plaisir de vous y rencontrer?

«Absolument. On a même devancé la date de parution du premier polar pour être capable de le présenter à ce moment-là.»

Maïté Hamouchi

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En quelques lignes...

Quand elle n'était encore qu'une adolescente, Leah Hammett a perdu le garçon qu'elle aimait, noyé après avoir voulu secourir une femme coincée dans une voiture au fond d'une rivière. Des années plus tard, elle est la femme du pressenti candidat démocrate aux élections présidentielles des États-Unis. Alors que, pour la campagne électorale, ils doivent retourner dans la ville de son enfance, elle reçoit un SMS de son ancien petit copain lui donnant rendez-vous dans un endroit qu'eux seuls connaissaient. Qui s'amuserait à se faire passer pour un mort? Pourquoi cette histoire ressurgit-elle à la veille du Super Tuesday? Drame, histoires d'amour, trahisons sont les mots d'ordre de ce thriller palpitant. Écrit en alternance à la première et à la troisième personne du singulier, le roman du Québecois Martin Michaud garde le lecteur sur le qui-vive jusqu'au dernier chapitre, où toutes ses croyances s'écroulent… (mh)

«Sous la surface», de Martin Michaud, éditions Kennes, 349 pages, 20,95€

4/5