PHOTOS. Inde: Des jaïns ouvrent un hôpital pour soigner les oiseaux blessés

Se dressant face au mythique Fort Rouge des empereurs moghols au cœur du vieux Delhi, un hôpital de confession jaïne recueille et soigne les oiseaux cabossés par la vie.
par
Laura
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Ailes sectionnées, pattes cassées, maladies oculaires, intestinales... Trois à quatre mille volatiles mal en point sont traités gratuitement dans ce bâtiment de trois étages qui jouxte un temple jaïn.

S'aider mutuellement

Pour cette antique religion indienne, née en Inde il y a près de 3.000 ans et suivie aujourd'hui par moins de 1% du 1,25 milliard d'habitants que compte ce pays, toute vie, grande ou petite, est sacrée, et doit à ce titre être protégée.

Ses adeptes croient en une interdépendance des êtres vivants et une obligation de s'aider mutuellement. Les jaïns s'astreignent à un végétarisme strict. Certains de leurs moines et nonnes portent même un bâillon sur la bouche et balayent devant eux lorsqu'ils marchent, pour éviter d'avaler ou écraser par mégarde un insecte.

Pour des chiens ou des chats, "vous pouvez trouver facilement des cliniques privées, ou gérées par le gouvernement ou des ONG. Mais pour les oiseaux il n'y a rien", explique le docteur Dheeraj Kumar Singh en faisant visiter à l'AFP un étroit couloir où s'étagent des boxes de perroquets, corbeaux ou perruches.

Ventilateurs, collisions avec des rickshaws, prédateurs: pour un volatile, Delhi est une ville pleine de périls.

Pas de viande pour les rapaces carnivores

Des pigeons arborant des tumeurs hideuses somnolent dans leur compartiment. Un moineau a poussé le clapet de sa cage et sautille au milieu du chemin.

Les milans, eux, sont à la diète. Impossible de servir de la viande à ces rapaces carnivores. Dans l'enceinte du temple et de l'hôpital, aucun produit d'origine animale ne peut pénétrer, pas même une ceinture en cuir. Les cubes de paneer, fromage traditionnel du sous-continent, dont ils doivent se contenter ne semblent guère leur émoustiller les papilles.

Financé par les bons samaritains

Construit en 1957, le Bird Charity Hospital est financé grâce aux dons de la communauté jaïne et de visiteurs. Entre 30 et 40 oiseaux blessés ou malades sont amenés ici chaque jour par de bons samaritains pour y être soignés.

"De nombreuses personnes trouvent des oiseaux dans la rue pendant leur promenade du matin, au parc, à leur bureau...", explique le vétérinaire, masque hygiénique sur le visage et stéthoscope autour du cou.

Vers la liberté

Quelques minutes plus tard, la porte s'ouvre. Un jeune homme la franchit, tenant précautionneusement au creux de ses mains un milan sanguinolent. "Il volait au-dessus de notre rue. Il était en piqué pour attraper de la nourriture quand il s'est pris dans un fil de cerf-volant. Dans sa chute il s'est blessé et le sang a commencé à couler", raconte Manesh, 29 ans, déjà venu apporter d'autres patients à l'hôpital.

Sans tarder, le duo de soignants prend en charge le blessé. Affaibli, il ne bouge presque plus. Lui ouvrant le bec, ils y glissent une goutte de médicament, examinent sa vilaine blessure. Un peu plus tard, l'aile bandée, direction une cage pour la convalescence où le milan restera en observation.

Une fois remis sur pattes, les oiseaux ne sont jamais rendus à leur propriétaire ou leur sauveur. Amenés sur le toit de l'hôpital, ils y sont relâchés et, battant des ailes avec une vigueur retrouvée, s'envolent pour disparaître petit à petit dans le ciel.