La réalité augmentée bientôt dans les blocs opératoires

Réduction du risque chirurgical, durée d'hospitalisation raccourcie, patient mieux informé...plusieurs gastro-entérologues français expérimentent les bénéfices de la réalité augmentée dans le domaine de la chirurgie. Patrick Pessaux, chirurgien hépato-bilio-pancréatique au CHU de Strasbourg, l'un des premiers à avoir expérimenté ces nouvelles technologies, explique en quoi elles constituent le futur des blocs opératoires.
par
Laura
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"Dans 10 ans, on se demandera comment on pouvait opérer sans images 3D ni réalité augmentée", annonce Patrick Pessaux, chirurgien au CHU de Strasbourg. "Dans 5 ou 6 ans, la simulation des opérations et la navigation au bloc opératoire deviendra notre quotidien", poursuit le spécialiste qui compare ces technologies émergentes à l'apparition du GPS dans les véhicules.

Accéder plus facilement à un organe

Depuis 3 ans, dans son CHU de Strasbourg, où il pilote le service hépato-bilio-pancréatique, 150 opérations chirurgicales ont été réalisées à l'aide de la réalité augmentée, principalement sur le foie puis au niveau du bassin (pelvis, rectum). Seules deux autres structures en France - le CHU de Grenoble et l'institut Mutualiste de Montsouris - étudient ces innovations.

Concrètement, des logiciels informatiques de reconstruction en 3D de l'organe à opérer vont superposer des images scanner ou IRM du patient à des vidéos chirurgicales réelles. "C'est très utile pour accéder à un organe comme le foie qui est opaque, précise Patrick Pessaux. Jusqu'à présent, nous devions localiser la tumeur en palpant à la main le foie après avoir effectué la coelioscopie."

Un double avantage

Pour le chirurgien, l'avantage de ces techniques émergentes est double. Premièrement, les médecins peuvent expliquer au patient la veille de l'opération le déroulé précis de l'intervention à l'aide d'une tablette numérique. "Cette approche ludique et pédagogique a tendance à les rassurer", constate le spécialiste.

Deuxièmement, la visualisation de l'anomalie en 3D en amont permet de préciser les gestes du chirurgien qui, allant droit au but, diminue les risques d'effets secondaires. "Quand on cible la vésicule biliaire, dans 0,5% des cas, la voie biliaire principale, le conduit entre le foie et l'intestin, est affecté produisant des plaies. La réalité augmentée permet de voir ce canal caché dans la graisse et on peut donc l'éviter."

Une innovation future

Un essai clinique portant sur l'ablation de la vésicule biliaire (100.000 opérations par an en France) de 60 patients vient de s'achever au CHU de Strasbourg. Les données sont en cours d'analyse. "C'est une première dans le monde, nous allons répertorier sur les 60 patients, le nombre de cas où la réalité augmentée nous a permis de repérer le bon canal", explique Patrick Pessaux.

Si la réalité augmentée permet de préciser le diagnostic, préparer les opérations et informer le patient, elle ne s'invite pas encore dans les blocs opératoires. Aujourd'hui, la navigation permet de guider les chirurgiens pendant l'opération, en orthopédie notamment. Il faudra encore attendre quelques années pour que ces innovations, en cours de développement et de recherche, débarquent dans les salles d'opération.

Cette chirurgie du futur fera l'objet d'une présentation lors du 118e congrès de chirurgie digestive qui se tiendra à Paris, du 28 au 30 septembre. Seront également présentées pendant ces trois jours de nouvelles méthodes de chirurgie non-invasives, qui permettent de passer par les voies naturelles des patients supprimant les cicatrices ou encore l'utilisation d'un système de lumière fluorescence pour identifier des tumeurs pendant une opération.