Crise des migrants: L'action européenne se met en place pour limiter les départs

par
Camille
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"Nous ne voulons plus voir nos maris, nos fils, risquer leur vie pour se rendre en Europe. Nous les voulons ici, avec nous." Alors que l'Union européenne souhaite réduire l'immigration irrégulière, notamment en provenance d'une Afrique de l'Ouest dont les migrants sont désormais qualifiés d'économiques, des femmes de l'est du Sénégal rappellent combien la migration est une souffrance pour les pays de départ.

La région de Matam est une zone historique de départ pour l'Europe. "Nous avons une véritable difficulté à offrir des conditions de vie décentes à tous", concède Mamadou Diaw, maire de la ville. "La première difficulté est alimentaire. Nos agriculteurs ne parviennent pas à offrir une alimentation suffisante en quantité et en qualité tout au long de l'année." Les jeunes hommes ont donc pris l'habitude de quitter le pays, pour aller gagner ailleurs de l'argent qui servira à nourrir leur famille entre deux récoltes. Mais les difficultés vont bien au-delà de la question nutritionnelle : éducation, hygiène et santé sont également défaillantes. Surtout, "nous n'avons aucune perspective", raconte Abdou, un sexagénaire qui a vécu clandestinement pendant dix ans en Italie.

En novembre dernier, suite à l'afflux de réfugiés syriens et irakiens, l'Union européenne lançait un fonds pour financer la lutte contre les causes profondes de la migration africaine. Quelques mois plus tard, les premiers programmes démarrent.

COMBATTRE LES CAUSES PROFONDES

L'arrivée de nombreux migrants syriens en Europe a rebattu les cartes. Les 28 Etats membres ont décidé de renforcer la lutte contre les arrivées de migrants subsahariens sans papiers. "L'objectif n'est pas de lutter contre la migration, qui est un phénomène naturel", assure le commissaire européen en charge du Développement, Neven Mimica. "Mais nous devons faire le nécessaire pour passer d'une immigration irrégulière à une immigration légale. Que celle-ci soit un choix, pas une nécessité. Qu'il s'agisse d'une aspiration, pas de l'expression du désespoir."

Le sommet de La Valette, en novembre dernier, a accouché d'un fonds de 1,8 milliards € afin de financer des projets capables de combattre les "causes profondes" de la migration. Le commissaire européen s'est récemment rendu au Sénégal, pour officialiser le lancement des premiers projets. A Matam, c'est tout un projet autour de la nutrition et l'accès aux services de base qui a été lancé. Les jeunes seront également formés à l'agriculture, afin d'être capables de nourrir correctement leurs familles. Le projet est développé en partenariat avec l'Espagne, un pays qui a longtemps connu des arrivées de migrants en "pateras", ces bateaux à fond plat qui rejoignaient les îles Canaries depuis la côte sénégalaise, dans un voyage particulièrement périlleux. Tout comme l'UE, le pays compte sur des projets de ce genre pour offrir des perspectives locales aux candidats à la migration. Et, en fin de compte, réduire le nombre d'arrivées irrégulières.