Christine & The Queens, artiste multiple

par
Nicolas
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Connaît-on Christine & The Queens après avoir écouté son premier album «Chaleur humaine»? Qu'importe la réponse, puisque Héloïse souhaite surtout poser des questions. Notamment sur les identités multiples d'un même personnage. L'artiste aime se perdre et nous le confie.

Tout le projet Christine and The Queens semble questionner l'identité et le rapport soi. Pourquoi ces interrogations?

«Je dis souvent que l'album est l'histoire d'un corps et de ses contradictions. Je revendique avec ce personnage ce côté multiple. Christine, ou même ma vie, n'est qu'une succession d'identités. Cela permet d'être drôle et ludique.»

D'où le nom aux allures de groupe alors que vous êtes seule à l'origine du projet?

«Totalement. Le nom est né d'une rencontre assez précise que j'ai faite à Londres, de trois drag queens. Ce qui m'a frappé dans leur numéro, c'est la liberté qu'elles prenaient par rapport à toutes ces questions sur l'identité. Une vraie liberté par rapport au regard de l'autre et celle de se déguiser en femme alors qu'on a un corps d'homme. C'est se dépasser soi et utiliser ses faiblesses en les dressant en étendards. Pour moi, c'est aussi l'essence de la culture pop.»

Un voyage à Londres révélateur, des refrains en anglais. Le monde anglo-saxon vous inspire...

«Je me sens plus à ma place à Londres qu'à Paris. Les projets qui me touchent sont anglais, ça va de David Bowie à FKA Twigs. Ce sont des esthétiques déjà très hybrides. Écrire en anglais, qui n'est pas ma langue maternelle, c'est comme si je me protégeais d'une certaine pudeur. Mais j'écris de plus en plus en français, c'est peut-être que je veux dévoiler une part d'intimité.»

Comment ça se traduit en musique?

«Je recherchais cette étrangeté. Mais ce que je recherchais surtout en allant en Angleterre, c'est un certain minimalisme dans le son, une économie qui m'avait beaucoup marquée dans des instrumentations de hip-hop que j'écoutais beaucoup. Je n'étais pas pour la surproduction dans les arrangements. Comme avec les textes, j'avais envie de laisser de l'espace à celui qui écoute les chansons. En tant qu'auditeur, j'aime quand on ne me force pas à saisir un sens. C'est pour cela que je cite aussi dans mes références Bashung ou Christophe.»

Vous avez une formation théâtrale, d'où un côté dramatique dans votre musique et sur scène...

«Je travaille tout en même temps. Quand j'écris une chanson, je réfléchis déjà à comment la chanter sur scène, à cet endroit-là, avec tel costume. De cette manière, je suis vraiment enthousiasmée. Même en studio, je pense déjà à la scène. C'est propre à une nouvelle génération nourrie à l'image. Avec des outils comme Instagram ou Facebook, les ados savent comment se présenter, quel selfie placer sur leur profil.»

Sur scène, Christine & The Queens prend vraiment des allures de groupe avec musiciens et danseurs...

«Je trouve que la scène est vraiment décisive. Tu peux y augmenter l'album et apporter des lectures parallèles. J'aime bien aussi amener à la dernière minute dans le set des musiques qui me plaisent et que je viens d'entendre. C'est aussi présenter un univers.»

Nicolas Naizy

Christine & The Queens, «Chaleur humaine» (Warner)

En concert le 4 octobre au Botanique.

Crédit photo: D. R.